Après avoir quitté le centre d'Ica en touk-touk, nous rejoignons en bus la commune de San Clemente, au croisement de la Panaméricaine et de la route pour Ayacucho. Malgré la dure saison des pluies qui frappe les montagnes péruviennes, nous décidons de retourner dans les terres et d'aller tenter notre chance sur les hauteurs. Nous partons en stop pour rejoindre Ayacucho, à quelques 8 heures de route, après avoir franchit plusieurs cols à plus de 4000 mètres. Malheureusement, nous serons retenus à quelques dizaines de kilomètres de l'arrivée par un énorme glissement de terrain. Un mur de plus de 3 mètres de haut et 10 de large nous barre le passage. Qu'à cela ne tienne, nous nous tassons dans le pick-up pendant que nos sacs prennent la pluie à l'arrière, et prenons notre mal en patience. En cette saison pluvieuse, les services de déblaiement sont rapidement sur place d'autant plus que cette année, il y beaucoup plus d'eau et donc de glissements de terrain que d'habitude, et il ne nous faudra attendre que 5 heures que la pelleteuse nous libère. Lorsque la police péruvienne arrive enfin à organiser le traffic, ce n'est que pour nous faire avancer de 500 mètres, où une autre coulée de terre bloque là aussi le passage... Cette fois-ci l'attente sera moins longue, les ouvriers étant déjà au travail, et nous finissons par rallier Ayacucho en plein milieu de la nuit, vers 3 heures du matin. Notre chauffeur nous dépose dans un quartier désert et nous demande de le payer pour le trajet. Dépités, nous ne lui cédons que la moitié de ce qu'il nous réclame et nous retrouvons alors sur le carreau. Perdus en pleine nuit, sous la pluie, dans une ville déserte où nous n'avons aucun point de chute !
L'hospitalité des latino-américains fera encore ses preuves puisque nous serons immédiatement accueillis par une habitante de la ville, qui a elle aussi effectué une partie du trajet avec notre chauffeur peu scrupuleux. Elle nous ramène chez elle et nous fait une petite place dans une chambre inutilisée, le confort est sommaire mais nous lui serons à jamais reconnaissants de nous avoir ouvert les portes de sa maison. Reposés et requinqués, nous quittons notre abri au petit matin afin de chercher un endroit où s'installer quelques jours pour découvrir la ville.
Encore peu fréquentée par les touristes, Ayacucho est connue comme la ville aux 37 églises, elle a gardé tout son charme et l'accueil chaleureux que nous réserve ses habitants est surprenant. Nous y rencontrerons un patron de restaurant souriant, parlant couramment le français. Très sympathique, il avoue sans s'en cacher avoir apprit notre langue en prison, où il a séjourné à cause de ses idées politiques. Nous le retrouvons presque tous les jours pour discuter, et ce sera pour nous l'occasion d'en apprendre un peu plus sur un mouvement considéré comme terroriste, le "Sentier Lumineux".
Organisation Maoïste fondée à la fin des années 60 par Abimael Guzmán, qui est alors professeur de philosophie à l'université d'Ayacucho, elle prend vite de l'ampleur dans les milieux étudiants. Au débuts des années 80, le mouvement lance une insurrection armée et la guerre s'étend alors tout au long de la décennie. Qu'ils soient imputés au Sentier Lumineux, à leurs "ennemis" du mouvement révolutionnaire Tupac Amaru ou au gouvernement péruvien, les massacres présentent un bilan très lourd : plus de 26 000 morts, 4 000 disparus, 50 000 orphelins et 170 000 déplacés. Et ce n'est qu'en 92, avec la capture du leader Abimael Guzman, que l'organisation se divise et s'effondre. Aujourd'hui, Guzman est toujours prisonnier et le mouvement armé n'est plus, mais il subsiste toujours une cellule politique qui tente de se faire une place, notamment en cette période d'elections, bien qu'elle soit considérée inéligible par le pouvoir en place et donc interdite. Les dirigeants du parti réclament une "amnistie totale", qui viserait à faire table rase du passé, que ce soit pour les anciens du senderos ou pour les militaires ayant commis des exactions, mais à l'heure qu'il est tout le monde se renvoie la faute et personne ne veut vraiment reconnaître ses torts dans la guerre interne qui a touché le pays.
Heureusement, Ayacucho n'est pas connue que pour son passé terroriste car la ville fut la capitale du dernier empire pré-incaïque, la civilisation Wari, avant de devenir le berceau de l'indépendance péruvienne. En effet, c'est sur ces terres que se déroula la bataille qui libéra le Pérou du joug de la couronne espagnole, le 9 septembre 1824. Tous les ans, une grande commémoration a lieu sur le site de la Pampa de Quinua. Il s'y dresse un immense obélisque blanc, symbole de la ville, visible à des kilomètres.
Les alentours quant à eux regorgent de sites magnifiques, peu ou pas connus même par les locaux. Et c'est guidés par Christoph et Tessa, deux parapentistes belges installés dans la région, que nous partons à la découverte de l'étonnant site du Bosque de Piedras. Le temps ne nous permettant pas de voler, la journée étant tout de même trop belle pour ne rien faire, nous faisons une belle ballade au milieu de la forêt de pierres, un labyrinthe de gros blocs aux faces toutes lisses. On a l'impression de se retrouver au milieu de ce jeu qui consiste à empiler des bûchettes les unes sur les autres ! Le paysage est surréaliste, et nous croisons même quelques lamas et alpacas peu farouches qui viennent compléter le tableau. Nous faisons ensuite le tour d'un lac à 4000 mètres d'altitude, avant de redescendre au milieu des marécages, dans lesquels nous retrouvons Christoph, recouvert de boue, mais qui a finalement réussi à désembourber le 4x4.
L'hospitalité des latino-américains fera encore ses preuves puisque nous serons immédiatement accueillis par une habitante de la ville, qui a elle aussi effectué une partie du trajet avec notre chauffeur peu scrupuleux. Elle nous ramène chez elle et nous fait une petite place dans une chambre inutilisée, le confort est sommaire mais nous lui serons à jamais reconnaissants de nous avoir ouvert les portes de sa maison. Reposés et requinqués, nous quittons notre abri au petit matin afin de chercher un endroit où s'installer quelques jours pour découvrir la ville.
Encore peu fréquentée par les touristes, Ayacucho est connue comme la ville aux 37 églises, elle a gardé tout son charme et l'accueil chaleureux que nous réserve ses habitants est surprenant. Nous y rencontrerons un patron de restaurant souriant, parlant couramment le français. Très sympathique, il avoue sans s'en cacher avoir apprit notre langue en prison, où il a séjourné à cause de ses idées politiques. Nous le retrouvons presque tous les jours pour discuter, et ce sera pour nous l'occasion d'en apprendre un peu plus sur un mouvement considéré comme terroriste, le "Sentier Lumineux".
Organisation Maoïste fondée à la fin des années 60 par Abimael Guzmán, qui est alors professeur de philosophie à l'université d'Ayacucho, elle prend vite de l'ampleur dans les milieux étudiants. Au débuts des années 80, le mouvement lance une insurrection armée et la guerre s'étend alors tout au long de la décennie. Qu'ils soient imputés au Sentier Lumineux, à leurs "ennemis" du mouvement révolutionnaire Tupac Amaru ou au gouvernement péruvien, les massacres présentent un bilan très lourd : plus de 26 000 morts, 4 000 disparus, 50 000 orphelins et 170 000 déplacés. Et ce n'est qu'en 92, avec la capture du leader Abimael Guzman, que l'organisation se divise et s'effondre. Aujourd'hui, Guzman est toujours prisonnier et le mouvement armé n'est plus, mais il subsiste toujours une cellule politique qui tente de se faire une place, notamment en cette période d'elections, bien qu'elle soit considérée inéligible par le pouvoir en place et donc interdite. Les dirigeants du parti réclament une "amnistie totale", qui viserait à faire table rase du passé, que ce soit pour les anciens du senderos ou pour les militaires ayant commis des exactions, mais à l'heure qu'il est tout le monde se renvoie la faute et personne ne veut vraiment reconnaître ses torts dans la guerre interne qui a touché le pays.
Heureusement, Ayacucho n'est pas connue que pour son passé terroriste car la ville fut la capitale du dernier empire pré-incaïque, la civilisation Wari, avant de devenir le berceau de l'indépendance péruvienne. En effet, c'est sur ces terres que se déroula la bataille qui libéra le Pérou du joug de la couronne espagnole, le 9 septembre 1824. Tous les ans, une grande commémoration a lieu sur le site de la Pampa de Quinua. Il s'y dresse un immense obélisque blanc, symbole de la ville, visible à des kilomètres.
Les alentours quant à eux regorgent de sites magnifiques, peu ou pas connus même par les locaux. Et c'est guidés par Christoph et Tessa, deux parapentistes belges installés dans la région, que nous partons à la découverte de l'étonnant site du Bosque de Piedras. Le temps ne nous permettant pas de voler, la journée étant tout de même trop belle pour ne rien faire, nous faisons une belle ballade au milieu de la forêt de pierres, un labyrinthe de gros blocs aux faces toutes lisses. On a l'impression de se retrouver au milieu de ce jeu qui consiste à empiler des bûchettes les unes sur les autres ! Le paysage est surréaliste, et nous croisons même quelques lamas et alpacas peu farouches qui viennent compléter le tableau. Nous faisons ensuite le tour d'un lac à 4000 mètres d'altitude, avant de redescendre au milieu des marécages, dans lesquels nous retrouvons Christoph, recouvert de boue, mais qui a finalement réussi à désembourber le 4x4.